Le RPO (Run Pass Option) - vraiment une histoire récente ?

Dans un article antérieur, SMC a abordé l'émergence des "RPOs" (Run Pass Options) dans le football universitaire américain et la NFL. Cette tactique peut exister sous plusieurs formes, aussi variées que les racines de son évolution ; cet article vous propose de considérer quelques-unes de ses sources d'inspiration et son évolution.

Le défi tactique du toute attaque est de sélectionner un jeu qui a une haute probabilité de réussite en fonction des facteurs existants (son personnel, le personnel de l'adversaire et le schéma défensif anticipé selon les paramètres du match). D'accord, mais même avec la meilleure préparation du monde, un entraineur ne peut pas tout anticiper. Un jeu au sol à droite est appelé ; la défense envoie un blitz directement dans les dents de ce jeu pour une perte de deux yards. Si la défense dévoile son jeu à l'avance, l'attaque a peut-être un système d'audibles qui permettrait au quarterback d'opter pour un autre jeu. Si la défense annonce pas son jeu (en le masquant), quoi faire ? Ce n'est pas nouveau que les coordonnateurs offensifs se posent cette question. Bien avant le phénomène RPO, le RRRO (Run, Run, Run Option !) dominait le monde du football universitaire. RRRO ? Oui, nul autre que le Triple Option, car sur chaque action il y a trois porteurs de balle potentiels et c'est la lecture de la réaction défensive qui déterminera lequel des trois finira balle en main.

RPO - Illustration 1

Simplification :  le succès d'une attaque aérienne sophistiquée repose sur la capacité du quarterback à trouver le receveur qui se démarque et à lancer une passe précise dans le timing du jeu. Parce que le QB a plusieurs cibles possibles, on peut déjà parler d'options dans le jeu. Le fait que la passe doit théoriquement être dirigée vers la faiblesse de la défense résume la puissance de l'attaque aérienne moderne. Il y a plusieurs options sur chaque jeu de passe. Le jeu au sol traditionnel dépendait et continue de dépendre principalement sur le combat physique (incluant l'aspect technique) entre les deux unités. En disant ceci, on n'occulte pas du tout la contribution physique et technique dans le jeu de passe, mais on dit plutôt que le quarterback assume un rôle déterminant dans sa réussite. Quant à l'importance du runningback dans une attaque terrestre performante, il a déjà été prouvé que c'est le système qui prime et non pas les compétences du porteur (voir l'édition actuelle des 49ers).

L'évolution des systèmes offensifs qui placent de plus en plus le quarterback en shotgun a ouvert la porte au phénomène moderne du RPO. Avec le quarterback derrière le centre, il est presque impossible pour celui-ci de prendre une décision APRES le snap qui le verrait lancer une passe sur ce qui était à la base un jeu au sol : sur presque la totalité de ces jeux il doit tourner son dos à la défense pour remettre la balle et n'est donc pas en mesure de lire quoi que ce soit. Cependant, déjà au début des années 80s, les Nebraska Cornhuskers utilisaient une forme de RPO en jumelant un WR Slant derrière un lead option (voir illustration 2 et la vidéo accompagnante).

RPO - Illustration 2

Ce jeu stresse le défenseur qui a la double responsabilité de soit forcer un jeu au sol ou de défendre une zone sur un jeu de passe. Ce concept est fascinant car il devance ses descendants moderne d'une trentaine d'années ! Mieux que ça, on peut retrouver l'ADN des RPOs dans le fameux Packer Sweep de Vince Lombardi. Paul Horning, le halfback habile de Lombardi lors de la glorieuse époque des Packers (1958-1966) avait parfois l'option de lancer une passe au wide receiver selon la réaction défensive à son débordement.

RPO - Illustration 3

Dans les années 90s, plusieurs petits collèges ont commencé à donner des options à leur quarterback dans le but de se créer un avantage numérique. Si l'attaque a cinq bloqueurs pour six défenseurs, un de ces défenseurs doit être éliminé par la lecture du quarterback. L'exemple le plus simple est le Zone Read où la ligne offensive bloque zone en laissant le backside defensive end pour le quarterback. Si le defensive end plonge sur le runningback, le quarterback conserve la balle et le remplace avec sa course.

RPO - Illustration 4

Mais ce n'était que le début. Pour combattre une pression extérieure qui neutraliserait cette lecture, les coordonnateurs ont ajouté l'option (décision prise avant le snap dans le cas d'un avantage numérique ou après le snap en cas de blitz) de lancer.

RPO - Illustration 5

Une passe extérieure pour profiter du surnombre

RPO - Illustration 6
RPO - Illustration 7

Par la suite l'idée est venue d'inverser le défenseur éliminé par la lecture du quarterback : au lieu de lire le defensive end, pourquoi pas le bloquer et lire un défenseur de deuxième rideau à la place ? Et au lieu de courir pour le remplacer, on pourrait le remplacer par le tracé d'un receveur ! Un des premiers concepts à exploiter ce conflit est le concept "Stick/Draw".

Aujourd'hui, les entraineurs conçoivent leurs RPOs principalement en fonctions des habilités de leur quarterback. Avec un quarterback-athlète, il n'est pas difficile de combiner des passes simples avec des courses de celui-ci et, de plus, se créer un avantage numérique au niveau du nombre de bloqueurs relatif au nombre de défenseurs dans la boîte. Un runningback swing accompagné par un quarterback Dart en est un bon exemple.

Enfin, si on ne souhaite pas utiliser le quarterback comme coureur, il existe myriade façons d'attaquer un défenseur qui a la double responsabilité de verrouiller un gap sur un jeu au sol ou de couvrir une zone sur un jeu de passe. Dans la cinquième vidéo on voit le quarterback lire le Weak Safety (N°24) et lancer derrière lui quand il attaque le jeu au sol.

Maintenant à vous de jouer : Est-ce possible ? Un RPO dans ce clip d'il y a 70 ans.